Yvan Phaneuf
Le masque de la victime
“ Comment et pourquoi, moi, en tant que mâle, je cache mes émotions? ” Vous trouverez dans ce livre la description de douze masques classés en trois catégories : cinq masques d’anti-virilité, quatre masques d’anti-émotivité et trois masques de dureté. Voici une brève description de l’homme qui porte un masque de victime.
Un homme qui porte ce masque éprouve une grande difficulté à s’affirmer ouvertement et directement, ce qui résulte en l’insatisfaction de ses besoins. D’une façon différente de l’homme au masque de douceur, l’homme derrière le masque de la victime ressent son agressivité; il tentera de la camoufler, de l’étouffer, ce qui lui amènera un déchirement très désagréable en périodes de frustration. Tout risque de rester secret.
Par peur d’être jugé égoïste, de se sentir méchant, pour fuir le sentiment de culpabilité qui le ronge, l’homme au masque de victime essaie de présenter une image d’infortune. Il veut démontrer ainsi que sa vie n’est pas prospère, qu’elle est difficile, et ce, dans le but de susciter chez les gens qui l’entourent la pitié, le ménagement et la prise en charge.
Lorsqu’il parle de lui, de ce qu’il vit et de ses difficultés, il a tendance à caricaturer et à exagérer, ou carrément à mentir. Sa physionomie représente alors son vécu : le dos ou les épaules arrondis, le regard d’apitoiement, l’habillement sombre d’une modestie exagérée, tel un Séraphin Poudrier, figure mythique de la culture québécoise, qui symbolisait la difficulté d’assumer la prospérité de peur d’être sollicité ou d’avoir à donner. Ce type souffre habituellement d’une grande insécurité affective ou matérielle et s’y entretient en ne développant pas sa capacité d’affirmation. Il peut alors choisir pour “ régler ” son problème de se couper complètement des besoins autant affectifs que matériels et tenter de s’en passer. Ce type d’homme ne veut surtout pas attirer la convoitise, l’envie, le reproche, ce qui enclenche tout de suite chez lui une insécurité frisant la paranoïa ou une culpabilité très éprouvante et très destructrice; c’est pourquoi il utilisera ce masque. Il provient d’un milieu où répondre directement à ses besoins en les affirmant et en passant à l’action était souvent jugé égoïste ; il est découragé, au point de ne pas croire cela possible. C’est la castration. C’est pourquoi il est constamment aux prises entre son besoin et la culpabilité de s’en occuper lui-même. Conséquemment, il mise sur le fait qu’à l’image malheureuse qu’il projette, les autres se rendront compte de son besoin, et il en fera ses répondants. Il tentera de favoriser leur prise en charge par son attitude de gars souffrant et impuissant, mal pris, dans un dilemme, donnant souvent l’impression d’être victime d’une injustice. On veut l’aider, mais on a peur de le faire, on a peur de se mettre les doigts dans un mécanisme de générosité à sens unique. Ce malaise chez l’entourage provient de son manque de confiance et de son incapacité à se prendre lui-même en main lorsqu’il rencontre des difficultés. Il a tendance non pas à demander de l’aide, mais à suggérer d’être pris en charge, ce que personne ne tient à assumer, avec raison d’ailleurs.
À chacun la responsabilité de sa vie. Demander de l’aide est autre chose que de suggérer une prise en charge. Lorsqu’une personne demande de l’aide, elle a une attitude qui démontre en même temps qu’elle demeure responsable de sa vie et de ses actions. La prise en charge exprime plutôt que la personne met la responsabilité de sa vie, de ses problèmes ou de ses projets entre les mains des autres, ce qui ne passe pas bien aux yeux de l’entourage, sauf si la personne rencontre un sauveur qui aime prendre en charge pour se valoriser. À ce propos, pour l’homme qui porte un masque de victime, la moindre grippe est vécue comme un virus mortel, une bronchite aiguë lui permettant d’attirer l’attention, l’affection et l’amour dont il a tant besoin malgré sa tentative de s’en passer. Cette tendance à se victimiser pour favoriser la satisfaction de ses besoins et de ses plaisirs est à l’encontre de la virilité enseignée dans notre société, mais elle est adoptée par l’homme qui souffre de culpabilité et qui ne veut pas être identifié à la catégorie des “ méchants mâles ”, c’est pourquoi il évite l’affirmation directe.
Lorsque je pense à ce masque, bien sûr, je me revois dans certaines circonstances dont je ne suis pas nécessairement fier. J’avais besoin, mais je n’osais pas l’exprimer. J’avais envie, mais je ne disais rien en souhaitant que l’autre s’en rende compte. J’avais à ce moment-là un discours qui suggérait mon besoin, mais sans l’affirmer directement. Pour continuer à vivre de cette façon, je tentais d’anesthésier mes besoins. Maintenant, lorsque je me rends compte de cela, je cesse de tourner autour du pot et j’exprime mon besoin de façon claire; j’accepte ainsi le risque de m’attirer un refus. En agissant ainsi, je retrouve ma liberté et je cesse d’utiliser ce masque qui m’amène à perdre ma fierté. Cependant, la personne à qui je pense particulièrement est un gars que j’ai côtoyé dans le monde des affaires.
CAS VÉCU
CACHER LA PROSPÉRITÉ
Il arrivait toujours l’air de rien ; il était modestement vêtu, trop pour l’envergure qu’il avait acquise dans les affaires. Présentant de prime abord un air peu menaçant, jamais il ne faisait allusion à la bonne marche de ses affaires, sauf dans des moments précis, pour stimuler les autres dans le sens de ses intérêts. La plupart du temps, il ne voulait pas attirer la convoitise et prendre le risque qu’on lui demande quelque chose. Rien n’était jamais clair: chaque fois qu’il amenait un point au cours des négociations, il ne l’appuyait pas directement, mais donnait l’impression qu’il n’avait pas le choix et que l’on devait le comprendre. De plus, il était tellement “ insécure ” qu’il changeait d’idée constamment, ce qui troublait beaucoup son entourage. Plusieurs ont souvent éprouvé par après le sentiment d’avoir été manipulés en voyant quel homme prospère il était en réalité du point de vue financier.
Comme je le disais précédemment, c’est encore une fois, et comme pour tous les hommes qui portent des masques d’antivirilité, la conséquence du sentiment de culpabilité ressenti à l’affirmation qui rend impossible la satisfaction directe de ses besoins, tels les besoins d’amour et de sécurité.
Le livre
“ Les masques des hommes ” est le résultat d’une étude qui porte sur le contenu du cœur masculin et qui a été initiée à partir de la question “ Comment et pourquoi, moi, en tant que mâle, je cache mes émotions? ” Vous trouverez dans ce livre la description de douze masques classés en trois catégories : cinq masques d’anti-virilité, quatre masques d’anti-émotivité et trois masques de dureté. Le but de cet ouvrage n’est pas de faire perdre aux hommes leur identité masculine, mais de leur proposer de dénoncer et de retirer leurs masques.
ISBN 2-980-6675-0-1
L’auteur
Thérapeute en relation d’aide depuis plus de dix ans, Yvan Paneuf pratique la psychothérapie auprès d’individus, de groupes et de couples. Il a été éducateur auprès d’adolescents en centre de réadaptation et thérapeute en violence conjugale auprès des hommes. Il a effectué sur une période de quatre années une recherche traitant des émotions chez les hommes, et prononcé de nombreuses conférences sur le sujet.
Éditeur
Les éditions Dahlia
Pour en savoir plus sur les différents atliers et conférences de Yvan Phaneuf
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