La présence et l’effacement de l’ego
Voilà plusieurs questions qui me tourmentaient au tout début de mon cheminement spirituel. La notion même d’ego était une abstraction pour moi. Je ne voyais vraiment ni où ni comment je pouvais être égoïste, moi qui étais si consciencieuse et si honnête! C’est vous dire mon degré d’aveuglement. La question de la nature de l’ego me hantait au plus haut point. Comment concevoir l’effacement de l’ego sans en mourir? Je lisais dans les textes spirituels qu’il fallait aller au-delà de l’ego, de cet ensemble corps/émotions/pensées. Je me souviens très précisément d’un moment où la question est devenue insoutenable et insolvable. Mieux valait me jeter du haut du pont Jacques-Cartier tout de suite puisque je ne voyais guère d’autre solution à cette question. Heureusement, ces réflexions, quoique profondes, n’allaient pas me pousser jusqu’au geste fatidique. Je poursuivis plutôt mon questionnement et mes recherches. Je vois maintenant toute la résistance que ce fameux ego manifestait à travers ces questions, de même que le désir profond d’être libre qui se dissimulait derrière. « Libre de l’ego, libre de l’égoïsme », comme le disaient les enseignements. Ce fut le début de ma quête consciente d’absolu et de mon cheminement spirituel.
Le thème de l’ego n’est pas nouveau. Il est très vaste et je dirais qu’il est presqu’à la mode. « Mon ego est flatté. Mon ego est blessé », sont des phrases que nous entendons régulièrement. Mais savons nous vraiment de quoi nous parlons? Quelle est la nature de cet ego? De quoi est-il fait? Le sens des mots est toujours important. L’ego, qui est la somme de nos mémoires, de nos croyances et de nos conditionnements, reçoit les informations à travers ces derniers. Osho, le maître spirituel indien bien connu, disait : « Dès que vous dites non à quelque chose, dès qu’il y a conflit, l’ego apparaît.». L’ego devient alors synonyme de contraction. Les enseignements spirituels tentent tous de nous démontrer à quel point notre souffrance vient du fait que nous nous identifions à l’ego, à notre personnalité. Par où commencer cette « désidentification » et comment savoir si nous sommes dans notre ego ou dans notre humanité? Admettre que nous sommes imparfaits et que nous avons construit des murs de protection autour de notre cœur pour sauver notre intégrité en tant qu’individu est déjà un grand pas vers la reconnaissance de notre humanité. La présence à soi-même est un outil pour devenir plus conscient des mécanismes de défense. Tout travail spirituel sérieux met l’accent sur le développement de sa capacité d’observation des pensées, des sensations corporelles et des émotions et ce, sans poser de jugement. Accepter de ressentir ce que nous éprouvons à l’intérieur de nous-mêmes permet aux murs de l’ego de tomber, au cœur de s’alléger et au corps de se détendre. Voilà un programme qui, quoique simple, est souvent difficile. La présence à soi nous permet non seulement de regarder les stratégies de l’ego à l’œuvre mais de nous dégager peu à peu de cette identification à notre personnalité.
L’ego n’est pas un thème banal ni une affaire à prendre à la légère. Pour simplifier mais sans minimiser mon propos, je dirais que l’ego est facilement repérable dans nos relations dès que nous prenons conscience que nous sommes dans la peur, l’orgueil et/ou le volontarisme. J’ai eu besoin de plusieurs années de recherches, d’études et d’explorations pour découvrir l’ego, le moi psychologique. J’ai accompli tout ce travail en restant enracinée dans le moment présent, en pleine conscience de ce qui émergeait de l’intérieur de moi-même, le meilleur comme le pire. La transformation s’est opérée peu à peu et la guérison des blessures du passé s’est faite tout doucement. Ce qui me paraissait autrefois si compliqué me semble maintenant beaucoup plus simple. L’ego a été exposé et vu à la lumière de la conscience; il a été accueilli dans la bienveillance et l’amour. Le mécanisme de séparation qui caractérise l’ego s’est peu à peu atténué pour faire place à une ouverture à moi-même ainsi qu’à l’autre, les deux étant indissociables.
La relation à l’autre qui avait été à la base de mes blessures premières est devenue la grâce qui m’a permis de quitter l’état d’égoïsme pour aller vers un état d’ouverture. En me révélant à l’autre, j’ai touché ma propre vulnérabilité, la peur du rejet et de l’abandon, la peur de mourir et d’être annihilée. L’autre a servi de prétexte à ma croissance émotionnelle et de clé pour ouvrir la porte de mon cœur. Au fur et à mesure que mon cœur s’ouvrait, ce n’était pas vraiment lui qui s’ouvrait mais LE cœur. Ce que je nommais mon cœur était en réalité ce que j’appelle maintenant le cœur divin, le cœur de l’humanité. Plus je me permettais de ressentir mes blessures, plus mon sens de la séparation diminuait. Mes chagrins devenaient « nos » chagrins. Un sentiment d’être reliée à toute l’humanité m’habitait et un état d’unité et d’amour insoupçonné émergeait des profondeurs de mon être.
Après toutes ces années de travail acharné à observer minutieusement tant chez moi que chez les autres les mécanismes et les conditionnements qui forment ce que nous appelons l’ego, je vois avec beaucoup plus de clarté l’esclavage dans lequel l’ego nous maintient. Je vois également toute la souffrance souvent inutile qui en découle.
Si la mémoire est une faculté qui oublie, la mémoire est aussi la principale faculté de l’ego qui nous fait oublier la nouveauté de chaque instant. La mémoire nous coupe de la joie inhérente à la capacité de vivre dans la réalité de l’instant présent. Toute notre histoire personnelle est la mémoire de notre passé. C’est sur cette mémoire que nous avons fondé le sens de notre identité. Lorsque nous quittons un tant soit peu cette mémoire, quelque chose d’autre émerge: la Présence. Une présence silencieuse, la présence de l’être. Dans cette Présence, nous sommes vivants, vibrants, nous sommes Conscience non-conditionnée.
Prochain atelier : La présence, l’ego et les relations.
Dates : 1er et 2 novembre 2003.
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