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LA LOGE SACRÉE

«Nous allons dans la loge sacrée pour nous purifier. Nous allons là pour voir qui nous sommes vraiment, et pour voir dans la noirceur comment nous agissons sur cette Terre. Nous nous faisons humbles …

… comme la plus petite des créatures et nous prions l’esprit de nous guérir, de guérir tout ce qui vit. Nous voyons que nous ne sommes séparés de rien. Nous sommes tous ensemble.»
Un vieil indien Lakota

Le sweatlodge amérindien est une structure ronde recouverte de plusieurs épaisseurs de toile de façon à ce qu’on n’y voit goutte. C’est à même la terre battue; au milieu, un trou pour déposer des pierres brûlantes, chauffées toute la journée au feu de bois. On entre dans cet utérus à quatre pattes, complètement nu. Le nôtre logeait une vingtaine de personnes coude à coude. Une fois les pierres mises au centre, la porte se referme. Le guide offre l’eau aux pierres et la cérémonie commence. Ce qui se passe alors appartient à l’espace sacré du rituel. Disons seulement que, dans le noir et dans la chaleur intense du sauna, nous avons partagé nos larmes, exprimé la gratitude de faire partie de ce grand show magique, nous nous sommes plaints, nous avons ri, nous nous sommes liquéfiés en silence. Se liquéfier: perdre ses contours, n’avoir plus de limites, disparaître, mourir.

Dans cette expérience symbolique de la mort, j’ai mieux compris avec tout mon corps, pas juste avec l’intellect, quelque chose de cette âme amérindienne dont on entend tant parler par les temps qui courent. Tout est interrelié, je le sais, je l’ai lu, j’en ai l’intuition, mais là, dans ce milieu «aquatique», je l’expérimente des pieds à la tête. Comprendre que la Terre elle-même est vivante, que même les arbres et les animaux ont des droits, que le sens de la communauté n’arrête pas avec les réalités humaines, mais inclut le vent, la terre, la roche. Je ne sais comment l’expliquer rationnellement.

Je n’avais pas prié depuis belle lurette. J’en étais plutôt au «priez si vous voulez, mais sachez qu’il n’y a personne pour vous répondre». Mais ici, prier, souffrir (c’est très chaud le sauna!), évoquer les forces de la nature, être humblement accroupi sur le sol ou face contre terre quand on n’en peut plus, amener son corps aux limites de sa tolérance, demander grâce, tout cela a pris pour moi l’allure d’une extraordinaire métaphore sur la condition humaine: nous sommes bel et bien une humanité souffrante. Ces prières, qui parfois prenaient l’allure de lamentations, m’ont connectée directement à l’agonie de la planète.

Un fois sortie, je me suis écroulée dans la terre meuble, un type aux yeux clairs m’a offert en silence une tasse d’eau fraîche et j’ai regardé passer les nuages sans penser à rien. À quoi servent de telles expériences? À nous souvenir. Qu’avons-nous oublié?
 
Dans l’obscurité et la vapeur, sans aucun point de référence physique, très peu de références mentales, je n’étais plus que «cela», si petite, flottant dans cet abîme. Il y avait des frères et des sœurs de voyage. Et il n’y avait rien à comprendre. Voilà ce que j’oublie constamment.

Au départ, j’étais ambivalente face à cette cérémonie. S’asseoir en lotus pour méditer sur un coussin est, en quelque sorte, entré dans nos moeurs, mais il y a une gêne politique à emprunter des rituels sacrés aux Amérindiens qu’on a déjà pillés à l’os. Et puis, cette floppée de corps urbains, blancs, entre deux âges, qui entrent dans le sauna et invoquent le Grand Esprit… Bon… Au sortir de l’expérience, je me suis rendue compte comment j’avais besoin, comme Blanche, de ce type de rituels. Notre relation à la Terre est à tel point anesthésiée, notre vision d’un plan d’ensemble des politiques socio-économiques et de nos drames personnels est à ce point obscurcie que nous avons besoin, collectivement, d’être en état de choc. L’exotisme sert en partie à créer des états de choc.

Comme Blancs, nous ne pouvons échapper au fait d’être dans le clan des dominateurs. Mais nous pouvons choisis d’embrasser ce paradoxe qui consiste à faire partie de la culture dominante et à tendre la main en disant: «J’ai besoin.» Car nous avons grandement besoin. Ce geste possède aussi une fonction symbolique, c’est un geste de reconnaissance profonde envers le rôle unique des nations amérindiennes sur la planète.

Paule Lebrun
Directrice de l’école HO rites de passage

Extrait de son livre « La déesse et la panthère », aux éditions du Roseau

Chroniqueuse et journaliste de grand reportage – notamment à la revue Châtelaine et à la télé et la radio de Radio-Canada –  , rédactrice en chef de magazines qui ont marqué leur époque –Mainmise , Le Guide Ressource, Réseau – enseignante, thérapeute gestaltiste et auteure du livre  La déesse et la panthère ,  une série de chroniques inspirées de ses aventures en Orient et dans le Sud-Ouest américain – que le Devoir a décrit comme « costaud, intéressant et souvent audacieux »- , Paule Lebrun s’intéresse depuis toujours aux cultures autochtones et orientales.  Fascinée par la diversité et la puissance des rituels de ces traditions millénaires, elle les a analysés en profondeur pour en saisir l’essence et elle s’est donnée  pour mission de les réactualiser et les réintroduire peu à peu dans la culture occidentale. Depuis plus de 15 ans, au sein de son organisme HO rites de passage,  elle offre des conférences,  anime des ateliers et guide des voyages où elle communique et partage sa passion. Elle dirige aussi une formation en travail rituel pour  les professionnels désireux d’intégrer cet outil supplémentaire d’intervention dans leur pratique

PROCHAINES ACTIVITÉS DE HO

il est à noter que la plupart des voyages de HO dans le sud-ouest américain incluent une hutte de sudation amérindienne telle que décrite dans l’article précédent.

Rites de passage pour femmes
Date : 15 au 18 août 2008
Lieu : Auberge l’autre Versant (Mille isles, QC)
Guide : Agnès Arrhigi (Ma Premo)

Quête de vision sur les îles
Date : 18 au 27 juillet 2008
Lieu : St-Michel des saints, Québec
Guides : Paule Lebrun et Gordon Robertson

Quête de vision en forêt
Date :
1er au 10 août 2008
Lieu : Charlevoix, Québec
Guides : Joanne Bédard, Serge Ouellet, Marlène Sohier

Quête de vision dans les canyons
Date :
17 au 30 septembre 2008
Lieu : Canyon de Chelly (sud-ouest américain)
Guides : Gordon Robertson et son équipe

Pieds nus, terre sacrée : voyage initiatique dans le sud-ouest américain
Date :
26 août au 5 septembre 2008
Lieu : Arizona
Guides : Paule Lebrun et Jean-Marie Delacroix

Voyages réalisés en collaboration avec l’agence SPIRITOURS
Détenteur d’un permis du Québec

Infos et réservations : (514) 990-0319 / 1-877-990-0319

Pour en savoir plus sur l’auteure, nous vous invitons à visiter sa fiche sur Alchymed.

 

A propos de l'auteur

Alchymed réunit des centaines de spécialistes oeuvrant dans le domaine du développement personnel, des thérapies alternatives, des médecines douces, pour la santé et le bien-être global de ...

Nombre d'entrées : 4140

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