Le bonheur au-delà des peurs
Le psychologue Michel Giroux remarque que la peur de la solitude est liée aux attentes que l’on a face aux autres et que plus on attend son bonheur des autres, plus la solitude procure un malaise. Elle serait plus présente chez les moins de 25 ans qui n’ont pas encore suffisamment développé leur faculté à attendre leur bonheur d’eux-mêmes.
Rechercher le fait d’être seul, et par le fait même de se taire, est-il vraiment sain? Si c’est parce que les autres nous apparaissent menaçants, qu’on a peur d’être jugé, la fuite des contacts serait alors malsaine, selon Gilles Lussier, psychologue. Si la recherche de la solitude n’est pas un évitement, dit-il, mais un désir « d’un contact plus intime avec soi-même et les autres », ce que la solitude peut apporter, alors c’est sain. Il remarque que c’est normal d’avoir peur de la solitude car le développement même de la personne, de son cerveau, a besoin de contacts. Elle serait même « inscrite dans nos gènes », au même titre que la peur des serpents, nous apprend le biologiste de l’Université Laval, Cyrille Barrette. Comme l’être humain devait absolument vivre en groupe pour survivre, la peur de la solitude est devenue instinctive dans l’histoire de notre évolution. Sitôt que l’enfant se sent isolé de ses parents ou un individu de son groupe il se sent vulnérable. C’est là aussi un besoin de contacts, de proximité physique.
Aujourd’hui, ce vieux réflexe ancestral n’est plus autant justifié. L’organisation de nos sociétés oblige toujours les individus à appartenir à un groupe, mais elle permet de vivre seul. Les conditions matérielles nous aliènent moins aux autres et c’est un autre phénomène, cette fois lié à la vie urbaine et oppressante qui peut favoriser le goût de se retirer. « Les conditions dans lesquelles on vit présentement, le groupe est trop grand, trop anonyme, il y a une trop grande pression du groupe, donc on recherche la solitude et c’est une façon de vivre une vie plus humaine, d’être heureux en solitaire puisqu’on est capable de s’émanciper des impératifs biologiques du passé ». D’après ce que vient de dire Cyrille Barrette, la solitude peut donc répondre à un besoin légitime, et peut-on penser qu’il serait peut-être un nouvel instinct de survie?
Parler moins, communiquer plus
Il n’y a pas que le fait d’être seul qui fait peur, mais aussi son jumeau : le silence. Depuis plusieurs années, on a même érigé presque en dogme la nécessité de s’extérioriser. Récemment, la journaliste Isabelle Bergeron titrait son article de façon humoristique et pertinente : « Chéri, faut qu’on se parle…moins! ». Elle traite de la communication à l’intérieur d’un couple et interroge : « Mais la survie du couple passe-t-elle par ce dialogue ininterrompu »? Elle illustre quelques histoires et répond, en quelque sorte, lorsqu’elle écrit : « Petit traité des bienfaits du silence pour une vie de couple épanouie ». Ces remarques peuvent s’appliquer à toutes nos relations. La capacité de se taire apporte plus de réflexion, donc plus d’approfondissement et de connaissance de soi et de l’autre.
Oser se fréquenter soi-même
Il serait donc bon d’intégrer pour chacun une certaine habitude de solitude et de silence dans sa vie quotidienne. On peut aussi chercher à le vivre plus intensément en renouant avec la tradition des retraites, des ermitages. Il s’agit de faire un séjour dans un lieu qui offre cette possibilité de vivre un tête-à-tête avec soi-même, d’écouter ce qui nous vient de l’intérieur dans un climat de tranquillité et de recueillement. C’est une activité qui régénère le corps et l’esprit et rend par la suite les rencontres plus précieuses et amoureuses.
Pour en savoir plus sur l’expérience de l’ermitage, consulter le site www.ermitageclair-obsur.org ou écrire à [email protected].
L’article d’Isabelle Bergeron a été publié dans Coupdepouce.com.
L’émission « Peur de la solitude » fait partie de la série « De quoi t’as peur? » diffusée à Téléquébec.