L’élan du dauphin
Il apparaît désormais que, de toutes les variétés importantes de l’esprit qui ont émergé au sein de l’espèce humaine jusqu’à maintenant, l’esprit dauphin est celui qu’il faut préconiser dans un avenir proche pour accomplir la tâche de réfléchir, d’agir et d’évaluer ; et celui sur lequel il faut miser et fonder ses espoirs, quoi qu’il arrive — catastrophes, jours difficiles, guerres intestines et autres phénomènes qui changent radicalement la vie. Surtout, c’est l’esprit qu’il vous faut pour le bond. Faire le saut vous oblige à remanier suffisamment vos habitudes pour modifier le cours des choses, changer les règles du jeu, ou même, plus rarement, pour transformer la conception du monde à l’origine de toutes vos actions. C’est le bond.
Il faut retenir essentiellement à quel point l’esprit dauphin peut faire toute la différence lorsqu’il devient opérationnel dans votre tête : à quel point vos capacités dépassent vos anciennes performances — et tout ce que cela vous permet maintenant de faire ; à quel point votre conception de ce qui importe réellement dans la vie et dans le monde (vos valeurs, votre conception du monde, vos moeurs et votre philosophie personnelle) se met à évoluer constamment presque d’heure en heure ; enfin, à quel point votre nouvel esprit semble convenir parfaitement aux besoins et aux défis mis de l’avant par la nouvelle ère qui commence.
Même ceux qui font usage de l’esprit dauphin peuvent trouver cette situation déroutante, surtout lorsque les événements se bousculent et que le besoin de sortir des sentiers battus se fait sentir. Or, c’est justement dans ces moments que la dynamique du bondissement s’impose au penseur dauphin. Bien entendu, il y a une bien meilleure raison de porter une attention particulière à l’art et à la pratique du saut. En effet, bien que le saut n’en soit pas la seule indication, la dynamique qu’il met en oeuvre est la première conscience que nous avons des caractéristiques de l’esprit dauphin : son audace, sa capacité de soulever des poids lourds, son horreur de la stupidité, son refus de s’apitoyer, sa perspective ouverte sur l’avenir, son parti pris pour l’obtention des meilleurs résultats, sa recherche d’une percée décisive, sa défense du jeu infini, sa ferveur coopérative et son pragmatisme féroce.
Enfin, et plus fondamentalement, cela explique pourquoi la capacité et l’habileté du dauphin à bondir semblent être la clef pour comprendre tant de choses qui restent à faire sur la planète Terre autant que dans votre propre vie et la mienne. Dans cette nouvelle « ère du saut », il n’y a pas de premier intervenant plus apte que l’esprit dauphin.
Pour récolter les bénéfices du bond, point n’est besoin d’être virtuose, en affichant la finesse et la confiance d’un pro qui a effectué des bonds et des atterrissages pendant toute sa vie dans le but de changer les règles du jeu. Le bond est son propre arbitre ; il peut donner et reprendre à ses propres conditions, et il le fait. Toutefois, nous soupçonnons fortement que la civilisation moderne est née d’un moment d’illumination foudroyant, quand un nombre suffisant de personnes ont reconnu conjointement la puissance irrésistible d’un bond délibéré, bien planifié et bien exécuté.
Pour nous aider à comprendre pourquoi le bond est une notion si populaire et si durable partout où il est question de trouver un avantage concurrentiel ou coopératif, de passer à un niveau de rendement supérieur ou de contourner tout au moins cet autre et omniprésent « moteur de l’évolution » : la fréquence de l’échec.
Il y a en outre autre chose à dire là-dessus : l’idée, l’image et l’acte de sauter semblent exercer un attrait irrésistible sur certains de nos instincts et prédispositions les plus profonds. Comment expliquer autrement le recours incessant à l’idée de sauter dans les médias, dans nos métaphores et dans nos méditations ?
Que ce soit dans les discours de collation des grades ou les publicités, tous évoquent le concept de faire le saut. Rares sont les conseillers en développement personnel et
autres coachs de vie qui peuvent réfréner longtemps le désir d’exhorter leurs adeptes à préparer leur vision de l’avenir, à faire appel à leur tigre intérieur, à prendre une grande respiration et à trouver le courage de faire le saut.
Il y a donc quelque chose de séduisant, voire d’ensorcelant à vouloir s’engager dans le saut, à faire plus avec moins, à rêver à un niveau de productivité et d’efficacité supérieur, à s’y engager et à l’atteindre, à se mettre en quête du seuil d’une percée. L’idée d’exécuter le bond peut rapidement devenir un but en soi, qui peut produire les conséquences les plus inattendues — et parfois les plus désagréables — pour les gens peu méfiants et non initiés.
Le sauteur qui souhaite réussir doit donc savoir qu’il faut tout mettre en oeuvre pour se familiariser avec les tenants et aboutissants (en bref, avec les détails) du bondissement.
Typiquement, le bond s’effectue en 5 étapes. La première étape est de repérer la suite des choses. Dans le saut, vous prendrez conscience de certaines choses — les choses essentielles qui peuvent et doivent s’ensuivre.
La seconde étape est de repérer ce qui est «correct». Le « correct » dont il est question ici ne fait pas allusion à la rectitude morale. Pour le moment, nous en sommes à expliquer ce qu’il faut faire. Penser en dauphin ne signifie pas s’attendre à tout savoir à propos de tout ce qu’il faut faire. En revanche, pour réussir le bond, il est utile de savoir quelles sont les forces en présence et ce qui manque à l’appel, de flairer ce qui est indispensable et ce qui ne l’est pas, de déterminer ce qui va probablement convenir plus tard et ce qui ne conviendra sans doute jamais.
Troisièmement, le dauphin repère ce qui est «intelligent». Le penseur dauphin s’aperçoit assez rapidement, dans presque tous les cas, anodins ou décisifs, que repérer ce qui est intelligent exige d’abord d’ignorer ou d’abandonner tout ce qui est idiot. Pourquoi ? Il est généralement à craindre que le fait de s’obstiner à choisir des solutions idiotes nous ramène précipitamment au problème de départ.
La quatrième étape consiste à repérer ce qui est «bon». C’est maintenant que nous pouvons discuter du bien et du mal au sens moral. En effet, le penseur dauphin estime que réussir un saut est peu probable, même dans les plus simples des situations, particulièrement sur le long terme, si on n’a pas d’abord statué moralement sur le bien et le mal.
La cinquième et dernière étape est repérer «l’acte» ou «le geste». Certains individus ne veulent tout simplement pas s’engager, point à la ligne. Alors, ils s’abstiennent. Ils font des pieds et des mains pour éviter d’avoir à affronter un problème et à le résoudre. Déjà, dans votre enfance, vous avez remarqué ces individus, puisque ce défaut du caractère se manifeste généralement assez tôt dans la vie d’un individu. Le dauphin n’est cependant pas de ce groupe. Le penseur dauphin est, dans tous les sens du mot, un « réalisateur », c’est-à-dire un pragmatiste. S’il y a un élément incontournable à la base de la personnalité du dauphin, c’est la certitude qu’il y a un monde réel autour de nous et qu’il vaut mieux s’en préoccuper.
Ainsi, le futur continuera de nous surprendre et les choses vont devenir de plus en plus étranges. La meilleure façon de tenir le coup est de continuer de développer nos compétences en matière de « bond dauphin » pour repérer et préparer le prochain acte ou geste correct, intelligent et bon à accomplir. Rien ne le fait mieux que l’esprit dauphin
L’élan du dauphin par Dudley Lynch, publié aux Éditions de l’Homme
216 pages
ISBN : 978-2-7619-3715-3
Date de parution : 14 août 2013
26,95$
Pour en savoir davantage, visitez les Éditions de l’Homme (L’Élan et le dauphin)