Alchimie Interne et Rituel du Dragon
La matière originelle, ou structure, grossière, dense, opaque, insonore, grâce à une mutation, se transforme en quelque chose de transparent, lumineux, musical et qui permet, comme Laozi (Lao Tseu) le propose dans le Daodejing (Tao Te King) « d’utiliser les rayons de lumière mais de faire retour à leurs source » (LII), donc de transformer celle-ci en couleurs et en vibrations. Il s’agit bien là d’une simple opération artisanale où le Maître verrier, grâce à son savoir faire, à sa compétence réalise une œuvre autrefois alchimique qui fut réservée aux initiés. Un beau cristal peut contenir jusqu’à 70 pour cent de plomb. Si ce principe matériel est effectif, donc bien réel, et facilement compréhensible pour qui connaît le procédé, il n’y a aucune raison que sur un plan humain une telle mutation ne puisse s’effectuer. C’est ce que propose depuis des millénaires l’Alchimie Interne (Neidan ou Nei Tan) en Chine.
Parallèlement à l’alchimie « externe » qui, en Chine, fut à la base de nombreuses inventions comme la poudre, la boussole (pour orienter favorablement le laboratoire), l’extraction de l’or à partir du minerais grâce au mercure, le Tofou et ses dérivés, considéré comme du jade comestible, l’obtention de médicaments raffinés de nombreuses fois, l’alcool qui servait à la conservation des principes issus des plantes, l’alchimie interne a pour but de transformer dans l’adepte, qui sert d’athanor, ce qui est grossier en subtil puis de transmuter celui-ci en « autre chose » qui permet de se réaliser au sein même du Tao. La structure corporelle ( Ti – os et articulations) correspond alors au plomb, la forme corporelle (Xing – muscles et tendons), la circulation (Jing – correspondant à l’Essence) s’harmonisent et opèrent une fusion grâce au Souffle (Qi – à la fois respir et énergie vitale organisatrice et motivatrice). Le tout est alors transformé par le biais de la sensation (Tang – qui correspond à la chaleur) et de l’intention (Yi – qui correspond à la lumière) au sein de l’Esprit (Shen – Celui qui révèle) pour provoquer une Mutation (Yi – mutation ou transmutation que l’on retrouve dans le Yijing ou I King) vers « autre chose encore » (Hua – ce qui en chinois n’est pas précisé mais que nous nommons en occident parfois « Divin »).
Cette « autre chose encore », claire, lumineuse, pure, subtile se fond alors avec le Tao pour opérer une Œuvre. Cette Œuvre peut être « philosophale » mais correspond à un « Maître Intérieur » que Wang Yang Ming, philosophe et homme d’action de la Dynastie Ming, nomme Liangzi (parfaite connaissance intuitive ou compréhension globale). Connu comme O’Yomei au Japon il influencera en profondeur les Voies de l’Arc, du Thé, des Fleurs permettant à ces pratiques d’atteindre la sublimation et de permettre l’Eveil de l’adepte.
Quoi de plus simple, et même de très grossier, que de tirer à l’arc pour tuer à distance l’ennemi, que de verser de l’eau chaude sur des feuilles ou que de couper des fleurs pour les disposer dans un vase ? Mais quoi de plus subtil que le décocher d’un Maître de Kyudo, que le cérémonial d’un Maître de Chado ou que le mouvement symbolique reliant la Terre au Ciel d’un Ikebana ? Un geste simple, une intention primordiale, une pensée initiale, de même, peuvent ainsi opérer une mutation permettant cette fusion dans la Voie (Do) ou le Tao. Donc dans l’harmonie du mouvement de la vie. L’être humain dépasse alors la condition qu’on lui impose, ou plutôt, retrouve son originalité et redevient humain.
Etre Humain ou être humain c’est simplement ce que propose cette Alchimie Interne. Mais être humain réellement et autrement dans le respect d’autrui, de la nature et « d’autre chose encore », donc un être humain évolué (Zheng Ren – littéralement l’être humain ayant réalisé sa rectitude) et non un « petit être humain » (Xiao Ren) uniquement préoccupé par le terre-à-terre. « Etre humain, debout et libre qui sait agir à sa guise en conservant sa rectitude » est déjà tout un programme qui rejoint les propositions des Sages de l’Orient et, très probablement, de la Sagesse de nos ancêtres que nous avons oubliée ou méprisée au profit d’une gesticulation sans fin et sans limite.
Déjà sous les Ming, Wang Yang Ming proposait que les Trois Doctrines ne soient qu’une « San Jiao He Yi – Trois Enseignement s’Unissent en UN », donc que Bouddhisme, Taoïsme et Confucianisme cessent de s’opposer ou de se laisser opposer par les extrémistes et intégristes de tous poils n’agissant qu’à leur profit personnel et pour mieux endoctriner les consciences. Dans ce fait il apporta une révolution pacifique dont on ne parle pas mais qui est toujours présente dans le cœur des Chinois.
Retrouver les fondements initiaux de cette révolution pacifique est le but de cette pratique de l’Alchimie Interne qui s’inclue à la fois dans les Qigong classiques (Tao Yin Qigong ou Daoyin Qigong), les Arts Chevaleresques et les Arts Classiques du Tao.
Cette pratique utilise le corps de l’adepte, mais aussi son mouvement, son souffle, son intention et son esprit dans le cadre d’un Grand Rituel qui est celui du Ling Pao Ming (Clarté du Joyau Ecarlate) et qui est transmis depuis plus de trente ans d’enseignement par Georges Charles, successeur en titre de Wang Tse Ming (Wang Zeming ou Tai Ming Wong), descendant direct de Wang Yang Ming. Cette transmission est celle du « Poing des Trois Harmonies » qui allie pratique énergétique, chevaleresque et philosophale.
A l’occasion du Stage de novembre 2006, organisé par Marie-Andrée Lett, acupuncteure, nous étudierons les formes préparatoires du Kai Men Shi (« Ouvrir les Portes de la Pratique » et du Yiyin Fa (« Se préparer à la Nutrition ») pour aboutir aux formes les plus avancées du Tao Yin Fa « Pratique d’Entretien de la Voie », au Bâton de la Marquise de Dai (Xin Jue Gun) et aux Mutations de l’Alchimie Interne du Tigre Blanc et du Dragon Vert (« Neidan Baihu Qinglong Tong) et à la « Mutation des Cinq Eléments » au travers du Grand Flux (Wuxing Taisu Qigong).
Prendre conscience de l’Energie Vitale, mobiliser celle-ci, l’accroître, l’utiliser après mutation est déjà Œuvre Essentielle.
Découvrir cette dernière c’est réellement s’ouvrir vers d’autres perspectives.
Zhuangzi (Tchouang Tseu) explique simplement « C’est en empruntant le chemin que la Voie est tracée. La juste mesure permet la pratique. Pratiquer c’est chercher à atteindre un résultat. Etre proche de ce résultat c’est être proche du Tao. Il faut affirmer ce fait ! »
Il suffit donc de faire un premier pas pour découvrir peu à peu ce chemin menant au Tao.
Georges Charles pratique depuis 1958 et enseigne depuis 1974. Il a publié une quinzaine d’ouvrages (Exercices de Santé du Kung Fu chez Albin Michel, le Rituel du Dragon au Chariot d’or, Traité d’Energie Vitale chez Encre….) et plusieurs milliers d’articles concernant ces « Arts Classiques du Tao » ainsi que de nombreux hors séries (Médecine Chinoise, le Thé…). Il anime des stages et des conférences et a formé plus d’une quarantaine d’enseignants regroupés au sein de la Convention des Arts Classiques du Tao. Il vient régulièrement au Québec depuis 1985.
Stage annuel avec Georges Charles à Laval 3-4-5 novembre 2006
Informations : Marie-Andrée Lett
450-663-8165 [email protected]
Suivez les autres activités des Arts Classiques du Tao au Québec dans le calendrier Alchymed et dans la rubrique écoles-formation sous « Qigong Tao-yin Québec »
Site web dirigé par Georges Charles : www.tao-yin.com