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L’ESPÉRANCE

Vivre sans Espérance, c’était autrefois le sort de ceux qui étaient condamnés à l’Enfer après leur mort. Cela s’appelle le désespoir, et c’est le désespoir lui-même qui était l’Enfer. L’Espérance est la plus difficile des trois vertus sans lesquelles nous ne pouvons vivre : la Foi, l’Espérance et la Charité. C’est aussi la plus difficile à vraiment comprendre. L’Espérance est la vertu qui accompagne la Liberté. Vous ne comprenez pas ? Cela viendra. Le manque d’Espérance flagrant qui caractérise notre planète aux temps présents, du moins dans l’univers humain, est sans doute un symptôme d’un manque au moins égal de Liberté réelle.

La Charité, qui, elle, accompagne l’Amour, est mieux connue, plus intégrée dans nos consciences. Et si elle n’est pas suffisante, du moins existe-t-elle dans notre univers vécu, pleinement chez quelques uns, au niveau du désir chez beaucoup d’autres. La Foi, qui accompagne le Destin et la confiance dans la réalité du divin existe elle aussi, malgré ses manques et ses aléas négatifs. Mais à l’heure actuelle, dans l’humanité actuelle, l’Espérance fait cruellement défaut. Des milliards d’êtres humains ne savent la placer que dans l’Autre Monde, dans un au-delà de la vie plutôt incertain, que d’aucuns appellent “paradis”, mais que l’on ne trouve pas dans cette vie. Il faut mourir pour l’atteindre, à condition que… à beaucoup de conditions.

Il ne faut pas confondre. Le désir bien humain d’une vie meilleure, de réalisations pleines de beauté, d’accomplissements remplis de richesse n’est pas la même chose que l’Espérance. La plupart d’entre nous se contentent de souhaiter AVOIR. Et les avoirs que l’on souhaite ne sont, le plus souvent, que des compensations pour le manque d’être, des étourdissements qui font oublier, ne serait-ce que pendant quelques secondes, le désespoir profond de l’être. Qu’il s’agisse d’une voiture de plus, d’un meilleur fond de pension, d’une plongée en méditation ou même en prière, d’une motocyclette plus rapide, d’un nouvel amant ou d’une maîtresse plus excitante, tout cela n’est, le plus souvent, qu’une compensation à un manque intérieur. Ils nous permettent sans doute de vivre sans Espérer. C’est toujours ça de gagné. Il ne faut pas condamner, encore moins mépriser. Ces cataplasmes du désespoir permettent au moins de continuer à vivre, et ce désir de continuer à vivre est peut-être bien une sorte d’espérance, quelque part, néanmoins.

Le Fonds essentiel de l’Espérance n’est pas le Paradis, ni l’espoir du mieux de l’humanité, ni de la paix, ni de l’avoir sous n’importe laquelle de ses formes. L’Espérance ne devient collective ou universelle qu’après avoir vécu dans le coeur d’un ou de plusieurs individus. L’Espérance, dans ses fondations, appartient à une personne individuelle qui la vit à son propre compte, si l’on peut dire. Elle n’est pas une sorte de croyance, ni une variété de foi un peu particulière dans l’avenir. Elle ne peut pas être placée dans la collectivité, style « si je peux améliorer ma société, je pourrais espérer mieux pour moi-même et pour mes êtres chers ». Il n’est pas idiot de penser ainsi, mais cela ne marche pas. Deux siècles de révolutions, de ré-aménagements sociaux, d’expérimentations socio-politiques, n’ont rien changé. L’on ne peut pas attendre le salut des autres, ni d’une société, civile ou religieuse. Cela est carrément impossible, même si l’on fait semblant dans nos sociétés.  Le kamikaze n’attend plus rien de la vie, ni de lui-même, ni de la société. Il place son besoin d’espérance dans un autre monde qui peut exister… ou ne pas exister. Il n’a rien, n’est rien, n’attend plus rien et donc n’a plus rien du tout à perdre.

Tous ceux et toutes celles qui n’aiment pas exister ici-bas, qui recherchent activement, même à travers une vie spirituelle riche, une vie désincarnée, dans un Ailleurs Meilleur, peu importe la définition et la conception qu’ils s’en font, tous ceux-là et toutes celles-là vivent une désepérance ou un désespoir réel. Pas plus que le kamikaze ils n’attendent quoique ce soit de “bon” d’eux-mêmes, de la vie, de leur corps ni des autres ni des sociétés. C’est pourquoi ils ne vivent pas vraiment. Ils ne sont ici “qu’en attendant”. Ils n’espèrent plus, peut-être n’ont-ils jamais espéré ! Ils disent qu’ils voudraient être aimés, mais ils ne s’y attendent pas vraiment. Et ils évitent soigneusement d’aborder la question de leur capacité personnelle à aimer. Ils le voudraient sans doute, le souhaitent certainement, mais ils ne s’attendent pas réellement à le vivre ici et maintenant, même pas l’an prochain. D’une façon très fondamentale, très basique, le manque d’espérance dramatique qui existe dans le monde actuel tue toute capacité réelle à vivre la Foi et la Charité dans l’ici et maintenant. C’est pourquoi, sans doute, les grandes religions ont nécessairement placé l’objet de la Foi et la source de la Charité dans d’autres mondes plus ou moins inatteignables à partir de l’ici et maintenant. C’est encore pire pour le matérialisme rationaliste qui domine beaucoup de secteurs des sociétés d’aujourd’hui : ils ont érigé le désespoir en croyance fondamentale, la désespérance comme préalable à tout, remplaçant l’espoir par toute une série de compensations. L’émotion caractéristique d’une Espérance réelle est la Joie. Son intensité et sa durabilité traduisent la qualité de votre espérance personnelle. Cherchez la Joie, vous trouverez l’Espérance ! Pas ailleurs !

L’Espérance n’est pas une Foi de variété particulière, ni une Charité que l’on se fait à soi-même ou que l’on donne à autrui. L’Espérance est une perception intérieure. Elle est un «Voir » (ou un « entendre » ou un « ressentir »). Elle est impossible à partir d’une croyance, et, sans Elle, la Charité ne devient qu’un palliatif temporaire sans solution durable. L’Espérance est la perception de soi-même en tant que « capable de », d’une part, et en tant que « pouvoir de réalisation » d’autre part. Se souvenir que le mot réalisation signifie rendre réel. Se percevoir soi-même en tant que capable de et en tant que pouvoir de rendre réel, c’est là l’essence intime de toute Espérance. S’investir soi-même d’impuissance radicale tout en référant tout Pouvoir de rendre réel à des forces tout-à-fait extérieures à nous, ce n’est là que la marque d’un désespoir profond. Pourtant, que de religions n’ont proposé, ne proposent que cela ! Ce n’est que dans un deuxième temps, après que ceci soit acquis, qu’il devient possible d’étendre cette perception aux autres, et, à partir de là aux groupes, sociétés ou civilisations. Ce n’est qu’à partir de cette base primordiale que l’on peut discerner des variétés et des degrés dans l’Espérance, tout comme on peut le faire pour la Foi ou pour la Charité.

Cette perception fondamentale, qui nous fait le plus souvent cruellement défaut, est nécessairement rattachée à notre perception du Temps et de l’Espace. Normal, puisque le pouvoir de rendre réel s’exerce nécessairement dans le Temps, que cela se manifeste dans l’Espace (i.e. la matière, le corps, l’univers manifesté). L’Espérance nous ramène, dans un paradoxe apparent, vers l’Ici et le Maintenant, vers le Présent éternel du Temps en mouvement. C’est que l’Ici et le Maintenant, c’est que le Présent, ne sont pas immobiles, encore moins figés. Ils sont en mouvement, en route vers le Futur, vers un futur qui va devenir un nouvel Ici et Maintenant. L’Ici et le Maintenant (encore l’espace et le temps !) sont éternels parce qu’ils se déplacent (pour le Temps) ou que nous nous y déplaçons (l’Espace). Et c’est dans ce Mouvement que le capable de et que le pouvoir de rendre réel prennent toute leur dimension, leur pouvoir et leur actualisation. La racine du mot actualiser signifie que le potentiel ou l’être devient un acte. Et ainsi l’on trouve la clef par laquelle le Temps nous permet de rendre réel. Vous concevez que l’Espérance ne peut être la croyance dans tout cela. Il faut que ce soit une perception que chacun-e fasse à son propre compte. Or, il n’existe pas de société, quelle qu’elle soit, qui puisse percevoir quoique ce soit. Il n’y a que des individus qui le puissent. Il n’y a pas de hasard dans le fait que les sociétés qui réussissent le mieux en ce temps soient celles qui ont proposé à chaque individu la recherche du bonheur, la quête de liberté, le pouvoir personnel de se réussir, d’une part, et proposé une société qui supporte chacun-e dans cette quête d’autre part.

Les racines de la désespérance* se trouvent, comme presque tout le reste, dans les processus de la naissance et de l’enfance. Nous n’avons pas l’espace nécessaire pour examiner ceci en détails. Il suffira de dire ceci : mettez l’enfant dans un moule qui n’est pas son soi-même, de telle façon que son soi-même devienne inatteignable, refusez lui le pouvoir de rendre réel, masquez-lui la perception d’être capable de soi-même, de ses talents, des ses désirs. Caricature : “ne grimpe pas d’en l’arbre, reste jolie dans ta belle petite robe”. Cela suffit. L’Espérance meurt ou diminue fortement et l’enfant devient une cruche à remplir, un citoyen à conditionner, un récepteur tout bête de télévision, autre façon de continuer à vivre dans et malgré le désespoir.

Vous me demanderez : « Mais, docteur, si l’on désespère, comment peut-on arriver à l’Espérance ? Comment arriver à cette perception si essentielle de soi-même, du temps, du futur, alors que la désespérance a tué notre capacité à être capable de soi-même et le pouvoir de rendre réel ? » La réponse est pourtant simple. L’exécuter est plus difficile. La voici, cette réponse : il faut arriver dans cet état où continuer d’être soit une marionnette, soit immobile et figé, est devenu impossible pour soi ; dans cet état de Conscience où l’on voit bien que rien ne vaut la peine d’être vécu hors l’Espérance ; où l’Ici et le Maintenant seuls comptent, où l’Ailleurs Meilleur est devenu une Illusion pour la Conscience. Une fois atteint cet état, il faut risquer. Nous n’espérons plus rien sauf l’Espérance. Mais cette perception fondamentale nous échappe. Seul l’Acte de Pouvoir qui consiste à pouvoir rendre réel peut nous sauver. Nous n’y croyons pas vraiment. Nous y arriverons en nous disant quelque chose comme ceci : « Étant donné que rien d’autre ne vaut la peine d’être vécu, je risque un acte-de-mon-être… au moins j’aurai tenté. » Il vous suffit donc de risquer l’impossible. En vous souvenant à chaque pas du mot de Chenault : « Le difficile, nous le faisons tout-de-suite, Monsieur le Président, l’impossible prend un peu plus longtemps.» Et le miracle se produira infailliblement, je vous le promet : un rendre réel son soi-même s’actualisera dans la réalité vécue Ici et Maintenant. Vous le percevrez, le ressentirez, le goûterez. Et l’Espérance commencera à renaître. Et vous recommencerez, et recommencerez encore. Jusqu’à la Joie d’être rempli d’Espérance. Vous vous demandez comment je peux savoir cela et l’affirmer si fort ? Vous ne devinez pas ? C’est parce que l’auteur de ces lignes a déjà vécu tout cela !

Marc Bériault
Au Lac, le 26 septembre 2006.

*  La désespérance est le manque d’espérance. Le désespoir, lui, est l’état dans lequel l’on se trouve après avoir cessé même la quête de l’espérance.

Marc Bériault
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