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Une question pour Mélanie

Je lis une phrase de Joanna Macy: «Quel était votre rêve avant que vous ne cessiez de rêver?» Je m’étonne en silence. Je reprends lentement la lecture. «Quel était votre rêve avant que vous ne cessiez de rêver?» Froncement de mon sourcil mental. La phrase a un effet sur moi, c’est évident! Elle me tire par en arrière.«Hé! Reviens! Regarde-moi !» Je reviens donc sur mes pas tout en m’insurgeant. Elle ne s’adresse sûrement pas à moi, qui suis une rêveuse née. J’en ai fait mon métier! Mais elle insiste. «Paula, Paula, quelle était la nature de ton rêve avant que tu ne cesses de rêver?» Moi? Cesser de rêver? Finalement, je m’arrête, je contemple l’objet du délit, j’accepte de le laisser pénétrer. Je m’ouvre et laisse couler les mots à la verticale. Je suis remuée. Ce qui devait être atteint est atteint.

Et vous, dites-moi, quel était votre rêve avant que vous ne cessiez de rêver? Non, non, pas les petits rêves flotteurs qui nous aident à surnager au-dessus du vaste vide, pas la rénovation de la maison, pas le prochain amour, la prochaine promotion, pas le «jour-où-je-cesserai-de-travailler». Mais le Rêve essentiel. Vous, quel était votre Rêve essentiel avant que vous ne cessiez de rêver? Si vous voulez vraiment entendre la question, cessez de lire, fermez les yeux, ouvrez-vous et laissez les mots chercher dans le noir la cible à atteindre. Quand la cible sera touchée, vous le saurez!

La question s’adresse à la partie de nous qui dort d’un sommeil profond et fabriqué. Un sommeil qui, pour s’endormir, s’envoie derrière la cravate la télé-Valium, la consommation-Ativan, la politique-cocaïne. Cette question parle de la vision que nous n’avons plus, ni individuellement, ni collectivement. Même les moins romantiques d’entre nous, même la féroce classe moyenne supérieure, les régimes-de-retraite-mur-à-mur, même les fanatiques du «C’est-pas-mon-problème!» commencent à s’en rendre compte. Où est donc passé le rêve qui nous faisait vivre?

La question s’adresse à ma génération, prisonnière d’une immense peine d’amour dont le rêve est disparu comme une bulle de savon, après une apparition vibrante et lumineuse dont, socialement, nous ne nous sommes pas encore remis. À ma génération qui a déserté le bateau et qui transmet à ses enfants une incroyable peur de la mer et des rivages inconnus. Hé! baby-boomers! Quel était votre rêve avant que vous ne cessiez de rêver?

La question s’adresse à tous ceux, innombrables, qui ne vivent pas vraiment la vie pour laquelle ils sont nés et dont le cœur recèle un lac secret de tristesse stagnante. Elle s’adresse peut-être, surtout, aux gens de 20 ans, dont le sommeil est moins lourd que le nôtre, avec dans leur cœur des plages non domestiquées où peuvent encore s’inventer des révolutions, rouges comme des roses rouges. Hé! Mélanie! Hé! Jacinthe! Hé! Alexis! Rappelez-vous votre dernier rêve, celui qui était juste sous la surface hier quand vous avez décidé de faire le pas.

Kids, sachez-le, la société ne veut pas votre liberté, elle veut la sécurité de ses corporations, choses inertes dont la texture est blanchâtre comme l’opium. Ne goûtez pas à cette camelote qui vous rend dépendants, qui vous rend sourds à toute musique intérieure, qui vous empêche de fermer les yeux pour mieux voir. Étudiez de très près cette société qui vous ouvre les bras. Elle vous veut entre deux eaux, petits, assis, jamais debout, jamais splendides. La société ne tolère pas la splendeur!

Rêvez tout haut. Rêvez plus fort que l’incessant radotage des médias. Rêvez fièrement debout parmi les petits hommes moyens. Racontez-vous entre vous vos rêves pour mieux vous en souvenir. Vous rappelez-vous le film Dead Poet Society, quand, à la fin du film, tous les élèves montent sur les pupitres et affrontent la loi? Il y a les petites lois qui régissent les petits rêves, ceux qui anesthésient, et il y a la grande Loi qui régit les Rêves essentiels, ceux qui éveillent. Cette Loi-là, vos parents l’ont oubliée. Soyez leur mémoire! Ils ont besoin de vous.

À l’âge de 10 ans j’avais un rêve caché et tenace, qui a tenu le coup jusqu’à environ 16 ans. Je voulais être parachutiste. J’imaginais sans relâche le saut dans le vide, le moment terrible de la décision, l’exquise terreur qui se transformait en ivresse. Aujourd’hui la femme victime de vertige que je suis devenue commence seulement à sourire à l’adolescente passionnée que j’étais, après des années de brouille. Ce rêve d’un enfant se jetant dans le vide pour mieux flotter avec les anges, que je prenais pour un rêve insignifiant, portait en germe un Rêve essentiel, un de ceux qui sont là pour vous rappeler:

Friend, jump into the experience when you are alive… (Kabir)

Paule Lebrun
Directrice de HO, école québécoise de rites de passage

Extrait de son livre « La déesse et la panthère », aux éditions du Roseau

Chroniqueuse et journaliste de grand reportage – notamment à la revue Châtelaine et à la télé et la radio de Radio-Canada –  , rédactrice en chef de magazines qui ont marqué leur époque –Mainmise , Le Guide Ressource, Réseau – enseignante,  thérapeute gestaltiste et auteure du livre  « La déesse et la panthère » ,  une série de chroniques inspirées de ses aventures en Orient et dans le Sud-Ouest américain – que le Devoir a décrit comme « costaud, intéressant et souvent audacieux »- , Paule Lebrun s’intéresse depuis toujours aux cultures autochtones et  orientales.  Fascinée par la diversité et la puissance des rituels de ces traditions millénaires, elle les a analysés en profondeur pour en saisir l’essence et elle s’est donnée  pour mission de les réactualiser et les réintroduire peu à peu dans la culture occidentale. Depuis plus de 15 ans, au sein de son organisme HO, école québécoise de rites de passage,  elle offre des conférences,  anime des ateliers et guide des voyages où elle communique et partage sa passion. Elle dirige aussi une formation en travail rituel pour  les professionnels désireux d’intégrer cet outil supplémentaire d’intervention dans leur pratique

PROCHAINES ACTIVITÉS DE HO

Formation en Rites de passages et travail cérémoniel
Québec :
Début Janvier 2008  / Montréal : Début mai 2008

VOYAGES DE RESSOURCEMENT ET SÉJOURS INITIATIQUES DANS
LE SUD OUEST

22 février au 1er mars 2008
Silence on rêve : une fascinante exploration  de nos images oniriques  à travers le miroir de la  nature et des échanges  en groupe.

11 au 19 avril 2008
Passion d’écrire :
après un bain de nature  sauvage, oser prendre la plume pour laisser émerger  l’inconnu en soi.

27 août au 7 septembre  2008
Pieds nus, terre sacrée :
une occasion unique  d’explorer le territoire sacré Navajo et de goûter la saveur de certaines pratiques rituelles autochtones. Guide Navajo.

13 au 26 septembre 2008
Quête de vision : un puissant rite de passage autochtone où vous partez jeûner seul au cœur des canyons pour recevoir les enseignements de la nature  sauvage.

Voyages réalisés en collaboration avec l’agence SPIRITOURS
Détenteur d’un permis du Québec

Infos et réservations : (514) 990-0319 / 1-877-990-0319

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A propos de l'auteur

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