Qu’est-ce que les femmes veulent vraiment ?

Voici une histoire de chevaliers de la Table Ronde. Quelquefois on éclate de rire en l’entendant. Quelquefois elle nous laisse juste enchantés et rêveurs, ou parfois on dit, en regardant le chéri dans les yeux: «Ça te rappelle quelque chose, hm…?» Un jour, le jeune roi Arthur s’égara dans les terres voisines pour chasser et fut surpris par le roi de l’endroit. Chasser sur un territoire étranger était une faute grave, punie généralement de mort, mais le roi fut ému par la jeunesse du coupable. «Je te donne une énigme, dit-il, et tu as un an pour trouver la réponse. Sinon, je te mets à mort. Voici l’énigme: qu’est-ce que les femmes veulent vraiment?»

Alors là, le jeune roi n’en avait pas la moindre idée. Mais il avait un an pour le trouver et cela valait mieux que d’être transpercé par une épée. Il revint au palais et alla trouver les plus vieux chevaliers, ceux qui avaient connu beaucoup de femmes, il alla voir les grands prêtres, les conseillers, le fou, mais tous haussèrent les épaules en disant: «Ah! si on savait, mon vieux!»

Il alla alors interroger ses cousines, les princesses, des suivantes, mais personne, même parmi les femmes, ne savait. À deux ou trois reprises on lui parla d’une vieille sorcière qui savait beaucoup de choses. Il ne restait que cinq jours avant la date fatidique quand le jeune roi décida finalement d’aller la voir. La chipie vivait dans une baraque insalubre avec une quinzaine de chiens, autant de chats et plusieurs oiseaux noirs qui croassèrent à son arrivée.

«Je sais la réponse, lui dit-elle, mais il y a un prix à payer pour une question si difficile et c’est très, très cher!

— «Et quel est le prix? demanda le jeune roi, prêt à donner sa fortune pour rester en vie.

— Le prix, dit-elle tout en se décrottant le nez de manière peu jolie, c’est que tu me donnes en mariage à ton plus beau et plus noble chevalier.»

Elle parlait de Gawain. Arthur ne put imaginer son cher ami avec cette dégoûtante créature, même pour sauver sa vie. Il ne dit mot et se retira. Mais Gawain entendit parler de la proposition et convainquit Arthur qu’il pouvait prendre la vieille pour épouse. Ils retournèrent donc auprès d’elle et lui posèrent la question: «Qu’est-ce que les femmes veulent vraiment?» «Ce que les femmes veulent vraiment, dit la vieille, c’est avoir la souveraineté sur elles-mêmes.»

C’était étrange, mais ils surent que c’était la bonne réponse. Le roi voisin l’accepta immédiatement et Arthur eut la vie sauve. On fit un grand mariage comme le voulait la mariée. Toute la cour était là. Plus d’une princesse essuya une larme furtive durant la cérémonie: voilà que se mariait le plus beau, le plus pur, le plus adorable homme de tout le royaume! On servit des mets raffinés, comme le voulait la coutume. La vieille mangeait la bouche ouverte, pétait, rotait, son nez coulait (elle avait le rhume), ses cheveux qui avaient résisté au peigne tombaient dans la soupe et elle dégageait une odeur d’enfer. Jamais la cour n’avait vu pareille chose. Mais c’était l’époque courtoise, et Gawain resta respectueux et attentionné envers sa femme, comme se devait de le faire un époux.

Approcha le moment de partager sa couche. Gawain se présenta à la porte de la mariée à l’heure dite et un phénomène merveilleux se produisit alors. La sorcière apparut au jeune chevalier sous l’apparence de la plus ravissante jeune fille que vous puissiez imaginer. Ses formes douces étaient pleines et irrésistibles, elle sentait le miel et l’ambre, ses lèvres charnues s’ouvraient comme une fleur, ses grands yeux pâles ressemblaient à deux mystérieuses lunes et sa chevelure blonde se répandait en cascade le long de son corps! Le chevalier fut ébloui. Il lui demanda ce qui arrivait. «Parce que tu as été courtois avec moi durant la cérémonie, dit-elle (d’une voix mélodieuse, bien sûr), je te montrerai une partie du temps mon côté hideux et une partie du temps mon côté gracieux.» Puis elle ajouta, en battant légèrement des cils: «Que choisis-tu? Me veux-tu belle le jour et horrible la nuit, ou belle la nuit et horrible le jour?»

Le genre de question pour rendre un homme fou! Jolie femme de jour: le respect des amis, le pouvoir, la fierté, la reconnaissance sociale… et hideuse la nuit! Aïe! Ou hideuse le jour: la risée, l’humiliante pitié, la honte… et magnifique au lit!…

Que faire? Le noble Gawain finit par répondre qu’il laisserait la mariée choisir pour elle-même. À cette réplique, elle lui répondit que l’enchantement maléfique avait cessé. Parce qu’il lui donnait la souveraineté sur sa propre vie, la liberté de choisir ce qu’elle était, elle serait belle avec lui jour et nuit.

Paule Lebrun
Directrice de l’école HO rites de passage

Extrait de son livre La déesse et la panthère, aux éditions du Roseau

Chroniqueuse et journaliste de grand reportage – notamment à la revue Châtelaine et à la télé et la radio de Radio-Canada –  , rédactrice en chef de magazines qui ont marqué leur époque –Mainmise , Le Guide Ressource, Réseau – enseignante, thérapeute gestaltiste et auteure du livre  La déesse et la panthère ,  une série de chroniques inspirées de ses aventures en Orient et dans le Sud-Ouest américain – que le Devoir a décrit comme « costaud, intéressant et souvent audacieux »- , Paule Lebrun s’intéresse depuis toujours aux cultures autochtones et  orientales.  Fascinée par la diversité et la puissance des rituels de ces traditions millénaires, elle les a analysés en profondeur pour en saisir l’essence et elle s’est donnée  pour mission de les réactualiser et les réintroduire peu à peu dans la culture occidentale. Depuis plus de 15 ans, au sein de son organisme HO rites de passage,  elle offre des conférences,  anime des ateliers et guide des voyages où elle communique et partage sa passion. Elle dirige aussi une formation en travail rituel pour  les professionnels désireux d’intégrer cet outil supplémentaire d’intervention dans leur pratique

Vous vous êtes senties interpellées par cet article ?
Alors vous êtes peut-être mûre pour le prochain atelier de HO rites de passage :

Rite de passage pour femmes
15 au 18 août 2008
Un bain de nature sauvage et d’intimité entre femmes. Une pause bienfaisante pour laisser partir ce qui doit partir, apprécier ce qui est et accueillir ce qui doit venir.  Un moment fort de renouvellement et de réflexion avec la terre-mère comme matrice pour déposer vos deuils,  accueillir un nouveau cycle de vie et faciliter la prise de votre envol.
Lieu : Auberge l’autre Versant (Mille Isles, QC)
Guide : Agnès Arrhigi (Ma Premo) et Paule Lebrun

Autres activités possibles…

Quête de vision sur les îles
18 au 27 juillet 2008
Une magnifique réserve faunique à deux heures de Montréal, aux abords du lac Lusignan, un oasis naturel bordé de plages sablonneuses et parsemé de vingt-sept îles sauvages de dimensions différentes . Chaque participant choisit son île où, le temps venu, on le dépose en canot. Une expérience inoubliable de solitude contemplative : premiers rayons de soleil glissant sur la brume matinale au milieu des huards et des loutres ; chorale de coyotes sous la voûte étoilée ; odeur musquée de la brise se faufilant à travers la végétation touffue de la forêt boréale. La paix dedans comme dehors.
Lieu : St-Michel des saints, Québec
Guides : Paule Lebrun et Gordon Robertson

Quête de vision en forêt
1er au 10 août 2008
Baie-des-Rochers, dans la région de Charlevoix. Un haut lieu de beauté et de nature sauvage , véritable métaphore naturelle de la transition entre 2 mondes -le fleuve et l’estuaire, l’eau douce et l’eau salée-. Chaque participant occupe un espace intime dans cet environnement grandiose ceinturé de parois abruptes s’harmonisant avec le couvert forestier des flancs montagneux. Un véritable festin pour les sens : le rythme des marées, l’odeur des algues, le clapotis des vagues, la caresse du vent, la présence envoûtante des oiseaux échassiers et marins, des phoques et autres animaux terrestres. Une impression du bout du monde pour nous ramener au centre de nous-mêmes.
Lieu : Charlevoix, Québec
Guides : Joanne Bédard, Serge Ouellet, Marlène Sohier

Voyage initiatique : pieds nus, terre sacrée 
25 août au 05 septembre 2008
Cette aventure puissante et intense combine des marches silencieuses quotidiennes dans des paysages époustouflants de beauté à des nuits de camping à la belle étoile dans la nature sauvage. Plongé en plein coeur d’un territoire autrefois sacré pour les indiens, le voyageur découvrira la richesse de la culture traditionnelle autochtone goûtera aussi à la saveur particulière de certaines pratiques de présence à soi inhérente à cette culture qui nous rendent plus réceptifs à la beauté et la grandeur des lieux. Une merveilleuse occasion d’arpenter dans un même mouvement des paysages intérieurs et extérieurs.
Lieu : désert d’Utah et d’Arizona
Guides : Paule Lebrun et Gordon Robertson
Animateur invité : Jean-Marie Delacroix, psychothérapeute gestaltiste

Quête de vision dans les canyons
17 au 30 septembre 2008
Canyons de Chelly : le centre du territoire sacré navajo. Une impressionnante fracture de l’écorce terrestre, tapissée de rochers ocres et rouges qui s’embrasent au soleil couchant. C’est quelque part au pied de Spider Rock, une divinité autochtone, véritable flèche minérale de 250 mètres de hauteur surgissant du fond du canyon, que chaque participant établit son lieu de pouvoir. Là, dans les profondeurs de cette terre à la fois riche et aride foulée par de nombreux animaux sauvages – coyotes, troupeaux de chevaux en liberté, ours et chevreuils -, vous attendrez que la vision se révèle à vous.
Lieu : Canyon de Chelly (sud-ouest américain)
Guides : Gordon Robertson et son équipe

Voyages réalisés en collaboration avec l’agence SPIRITOURS.
Détenteur d’un permis du Québec

Infos et réservations : (514) 990-0319 / 1-877-990-0319
www.horites.com 
[email protected]

Pour en savoir plus sur HO, nous vous invitons à visiter leur fiche sur Alchymed.